Vous êtes directeur du Bureau de Normalisation du Gaz, quels sont le périmètre d’intervention et les principales missions du BNG ?

Au cœur des activités techniques du syndicat professionnel de la filière, le BNG est l’opérateur gazier du Système Français de Normalisation depuis plus de 50 ans. Comme pour France gaz, le champ d’intervention du BNG couvre :

  • les gaz combustibles et carburants et notamment le gaz naturel, les gaz renouvelables, l’hydrogène, les gaz liquides et le diméthyle éther recyclé (rDME) ainsi que leurs mélanges ;
  • sur l’ensemble de la chaîne gazière : le transport sous forme gazeuse ou liquide (GNL), traitement (odorisation, purification, qualité), distribution, comptage, régulation, installations intérieures dans les habitations ou les véhicules de loisirs, jusqu’aux utilisations dans les appareils que ce soit les chaudières, les appareils de chauffage individuels domestiques ou tertiaires, les appareils de cuisson domestiques ou professionnels, les appareils de camping mais aussi les services associés comme le diagnostic des installations intérieures ou l’entretien des chaudières.

Nos travaux sont réalisés dans vingt commissions de normalisation qui sont en général le miroir de structures européennes (CEN) et/ou internationales (ISO), gérées par les 5 ingénieurs du BNG accompagnés d’une assistante.

Nous gérons aussi une vingtaine de groupes de travail européens et internationaux et assurons le management de quatre comités techniques CEN ou ISO.

C’est d’ailleurs ainsi que la France est le pays qui détient le plus de responsabilités en matière de normalisation européenne et internationale dans le domaine du gaz puisque AFNOR et BNG assurent plus de 30% des secrétariats techniques CEN et ISO du domaine gazier.

Nos principales missions consistent à élaborer et gérer les documents normatifs français et à défendre les intérêts de la filière gazière française dans l’établissement des normes du gaz européennes (CEN) et internationales (ISO).

Tout cela dans le strict respect des exigences d’impartialité et de transparence du système français de normalisation.

Le BNG vient de publier son rapport d’activités 2023, qui présente notamment les travaux effectués par les Commissions de Normalisation, les programmes de travail et les perspectives d’avenir. Quels sont les grands enseignements à tirer de ce rapport ?

En 2013, Claude REVEL alors Déléguée Interministérielle aux Normes, écrivait dans son rapport : « L’influence normative est une action d’amont fondée sur une ingénierie professionnelle ». Outre un bilan d’activités de chacune des commissions du BNG et en particulier leur programme de travail triennal, notre rapport d’activité présente l’écosystème dans lequel nous évoluons.

Pour exercer son activité, le BNG reçoit un agrément ministériel à renouveler régulièrement et, comme tout bureau de normalisation sectoriel, une délégation d’AFNOR. Notre travail est cadré par un système de management de la qualité dont ce rapport présente les indicateurs de pilotage. Le travail de normalisation ne pourrait se faire sans l’apport des parties prenantes que sont en premier lieu les entreprises, qui contribuent à la fois financièrement et en nommant des experts tant dans les commissions nationales que dans les groupes de travail européens et internationaux, qu’elles soient des grands groupes internationaux ou des PME voire des start-up. Les commissions accueillent aussi les laboratoires, les organismes certificateurs et l’administration. Il nous est malheureusement plus difficile de mobiliser les organisations de consommateurs et les ONG en particulier environnementales pour qui l’accès aux travaux est pourtant rendu gratuit depuis 2009.

Au-delà des aspects structurels des travaux de normalisation de la filière gaz, le rapport montre la diversité de nos activités. Nos sujets phares sont bien sûr orientés vers la transition énergétique et la décarbonisation des énergies. Les nouveaux gaz renouvelables sont traités dans presque toutes nos commissions. Soit pour assurer leur production/qualité, leur transport/distribution ou leur comptage, soit pour s’assurer de la compatibilité des matériaux qui les côtoient et du bon fonctionnement des appareils et des applications qui les consomment.

L’efficacité énergétique est aussi un axe de travail de nos commissions « utilisation».

Enfin, les aspects liés à la sécurité tant des infrastructures que des appareils, qu’ils soient utilisés par des professionnels ou des particuliers, sont au cœur de nos préoccupations.

Ce rapport devrait aussi permettre d’apporter un éclairage sur un sujet actuellement à la mode, celui de « l’inflation normative ». Le mot « norme » n’est pas un gros mot. On entend trop souvent qu’il y a trop de normes. Il s’agit là, pour ceux qui s’en plaignent, de normes juridiques (textes réglementaires : Lois, décrets, arrêtés nationaux ou règlements et directives de niveau européen). Dans notre rapport d’activité (au § 4.5), ce sont au niveau français l’arrêté du 23 février 2018 sur les installations de gaz dans l’habitat, l’arrêté du 13 juillet 2000 pour les réseaux de distribution de gaz, l’arrêté du 5 mars 2014 dit multifluides, et au niveau européen ce sont le règlement appareils à gaz, la directive équipements sous pressions, les directives éco-conception… Ces textes émanant des instances administratives réglementaires sont d’application obligatoire et peu sujet à concertation.

« Nos normes », qui constituent la collection française des textes normatifs publiées par AFNOR, sont en général d’application volontaire. Elles sont élaborées au sein d’organismes indépendants (BNG, autres bureaux de normalisation sectoriels ou AFNOR) selon des procédures définies impliquant l’ensemble des parties intéressées qui le souhaitent avec l’objectif de dégager un consensus. Elles viennent pour la plupart en soutien des textes réglementaires cités plus haut et permettent à ceux qui les appliquent de démontrer la conformité à leurs exigences. Plutôt qu’un fardeau, nos normes sont des outils de simplification.

L’hydrogène et le biométhane sont deux filières en plein essor. Comment le BNG œuvre-t-il au développement de ces filières, aux niveaux français, européen et international ?

Le BNG a été à l’origine des travaux de normalisation européens sur le biométhane. Dès qu’il en a eu l’occasion (2014), il s’est positionné et a obtenu d’assurer le secrétariat du CEN/TC 408 chargé d’élaborer la série des normes EN 16723, dont la partie 1 concerne la qualité du biométhane injecté dans les réseaux et la partie 2 celle du biométhane utilisé comme carburant. Aujourd’hui, ce comité technique évolue en élargissant son domaine d’application aux gaz renouvelables et bas carbone riches en méthane.

Fin 2023, un contrat a été signé avec la commission européenne et le CEN (EISMEA) pour que le BNG entame des travaux sur trois ans pour l’adaptation à l’hydrogène de la série des normes EN 1918 sur le stockage souterrain.

Coté utilisations, le BNG qui assure le secrétariat du groupe de travail WG1 du comité technique CEN/TC 238 (à secrétariat AFNOR), prépare la révision de la norme EN 437 sur les gaz d’essais pour y introduire de nouvelles catégories d’appareils (chaudières, tables de cuisson, fours, radiateurs…) susceptibles de fonctionner avec des mélanges méthane/hydrogène jusqu’à 20% d’hydrogène puis de l’hydrogène pur et définir les essais à réaliser en vue de leur certification.

Le BNG assurant l’animation et le secrétariat du groupe de coordination des comités techniques européens qui couvrent les utilisations du gaz (SFG-U), il s’implique directement dans la constitution d’un nouveau groupe européen pour la coordination des travaux de normalisation européens sur l’hydrogène qui sera piloté par le DIN (équivalent allemand d’AFNOR).

Le BNG est un bureau de normalisation sectoriel, il est pleinement impliqué dans sa filière. Salariés de France gaz, les ingénieurs du BNG ont aussi d’autres activités telles que la réalisation d’audits pour la certification des appareils ou la reconnaissance de laboratoires, l’animation de commissions de Frange gaz (Transport/Stockage, Distribution, Efficacité énergétique) ou le secrétariat de comités de l’association européenne de l’industrie gazière Marcogaz.

Cela leur permet d’être en contact direct avec les parties intéressées qu’elles soient des groupes internationaux ou des PME pour contribuer au développement de la filière dans ces nouvelles orientations.